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Posts Tagged ‘hors-sol’

Je suis tombé sur quelques entretiens intéressants avec Augustin Berque (dont je parlais ici et que j’ai découvert il y a quelques années sur le site de Mona Chollet), qui poussent les réflexions un peu plus loin concernant l’empreinte écologique et notre rapport au monde, éclairent pas mal d’angles morts et ouvrent pas mal de fenêtres.
(cliquer sur les liens pour accéder aux vidéos)

Il ne faut pas réduire le problème à sa dimension écologique par lecafeavec
Les écolos ne se posent pas le problème de l’écoumène, cela reste dans un angle mort du mouvement écolo actuel. Or notre relation à la Terre n’est pas uniquement écologique, elle est également écouménale, elle implique aussi des systèmes techniques et des systèmes symboliques. C’est cette dimension technique et symbolique qui fait notre rapport au monde en tant qu’humains. Notre monde humain repose sur les écosystèmes mais il les dépasse également, il nous faut comprendre en quoi.

La technique est bel et bien une extériorisation, qui prolonge notre corporéité hors de notre corps jusqu’au bout du monde ; mais le symbole est au contraire une intériorisation, qui rapatrie le monde au sein de notre corps. Quand le robot Sojourner saisit cette pierre, là-bas sur Mars, il prolonge, grâce à la technique, le geste ancestral de l’Homo habilis, qui, voici deux millions d’années, investit dans un galet aménagé, tenu à bout de bras, une fonction jusque-là uniquement exercée par les incisives au-dedans de la bouche. Mais inversement, c’est avec ma bouche, ici et maintenant, que je parle de Mars et de Sojourner, qui sont loin dans l’espace, et d’Homo habilis, qui est loin dans le temps. Je peux le faire grâce à la fonction symbolique, laquelle, sous ce rapport, consiste donc à rendre présentes au-dedans de mon corps des choses qui en sont physiquement éloignées. Cela, ce n’est pas une projection ; c’est, tout au contraire, une introjection. La trajection, c’est ce double processus de projection technique et d’introjection symbolique. C’est le va-et-vient, la pulsation existentielle qui, animant la médiance, fait que le monde nous importe. Il nous importe charnellement, parce qu’il est issu de notre chair sous forme de techniques et qu’il y revient sous forme de symboles. C’est en cela que nous sommes humains, en cela qu’existe l’écoumène, et c’est pour cela que le monde fait sens.
(extrait de “Ecoumène, introduction à l’étude des milieux humains”, Augustin Berque)

“Ce monde là court à la catastrophe…” par lecafeavec
On n’a pas qu’un corps animal, on a aussi un corps médial, fait de projections et d’introjections. Ce corps n’existe qu’en lien avec le monde. L’humain et le monde que construit l’émergence de l’espèce humaine sont co-dépendants. C’est le rapport entre ces systèmes (techniques et symboliques) extérieurs à notre corps et leur effet en retour sur le corps animal qui explique l’émergence de l’espèce humaine. On humanise l’environnement par nos systèmes symboliques, on l’anthropise par nos systèmes techniques. C’est l’effet retour des symboles et des techniques sur notre corps qui nous fait humains.
Cette notion de co-dépendance (ou co-suscitation) a été beaucoup plus creusée dans les traditions asiatiques que dans les traditions européennes. On pourrait avoir tendance à les rejeter car ces réflexions (dans les civilisations asiatiques) font aussi appel à des éléments religieux et mystiques, mais on aurait tort de se priver de ces sources-là car elles peuvent être des inspirations utiles pour pouvoir changer de rails.

La pulsion de retour à la “nature” détruit la “nature” par lecafeavec
Une des pires façons actuelles d’habiter le monde est ce qu’il appelle “l’urbain diffus”, ou que d’autres appelle “suburbia”, soit vivre loin des centres urbains tout en continuant à avoir avoir un mode de vie urbain, sur le modèle pavillon + voiture qui est l’idéal de beaucoup de gens. En arrière plan de cet idéal se trouve l’aspiration à vivre près de la “nature” (même si cette “nature” se traduit factuellement par du gazon et des thuyas). C’est en partie un mode de vie de riches qui s’est plus moins démocratisé avec la société de consommation, qui chez certaines élites anciennes incluait l’observation de la nature, mais excluait (ou forcluait, pour reprendre son terme) le travail paysan, le travail qui consiste à obtenir une production alimentaire par aménagement de la nature.
Outre cette “démocratisation”, cette aspiration à vivre près de la “nature” provient d’une pulsion très ancienne qui est celle du retour à la matrice originelle (ou nostalgie du sein maternel). Cette pulsion, dans la façon dont elle s’exprime aujourd’hui, a des résultats destructeurs tant au niveau écosystémique qu’humain.

“Nous assistons à la transformation de l’humain en cyborg” par lecafeavec
Le mode de vie campagnard et son rapport particulier à la terre subsistent aujourd’hui à l’état relictuel dans l’occident. Le développement de la société de consommation à partir des années 1950 a engendré l’extinction de la culture paysanne, laissant place à des entrepreneurs agricoles fonctionnant sur un mode civilisationnel urbain.
L’urbain diffus défait la ville et défait la campagne, par un système mécanique qui se développe selon sa propre logique. Tout se construit en fonction de l’usage de la voiture, qui tue pourtant 1.5 millions de gens par an dans le monde. On adapte nos espaces à l’automobile plutôt que l’inverse.
Au-delà de cette omniprésence et ces dégâts humains causés par la voiture, les systèmes mécaniques transforment l’humain en cyborg (être ne pouvant pas vivre sans machine), dans la mesure où on pense le monde en terme de machine (pensée mécaniciste moderne issue entre autres de Descartes).

“Il n’est pas certain que je veuille laisser une épitaphe par lecafeavec
Il faudra sûrement une catastrophe pour servir de déclic au dépassement de l’idéal pavillon + voiture, au changement de notre rapport au monde.

Il y aurait encore beaucoup de choses à développer à partir de ces entretiens, ça sera peut-être l’objet d’autres billets à suivre.

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Le miracle économique qui suscite dans les mouvements sociaux d’aujourd’hui tant de soupirs nostalgiques [des “Trente Glorieuses”] s’est opéré par le biais d’une dépossession croissante des activités quotidiennes au profit d’administrations publiques ou privées. Les savoir-faire agricoles ont été expropriés au profit de la recherche agronomique ; notre alimentation au profit de chaînes de distribution sur lesquelles nous n’avons aucune prise, de même que nous avons délégué la gestion des déchets, de l’eau, l’entretien des espaces naturels et des monuments, jusqu’à notre capacité à nous divertir et à nous représenter le monde, cédée à la télévision d’Etat puis aux grands groupes médiatiques. Il n’est pas étonnant que chacun ait du mal à se reconnaître dans un monde dont il n’est plus responsable que de manière fictive. Savoir qui l’on est, cela passe aussi par la capacité de façonner son environnement immédiat, à établir soi-même et avec d’autres ses propres besoins. Dans ce monde administré, l’identité se réduit comme peau de chagrin. Il ne reste, pour s’identifier, que la vie intime – largement formatée par le rayonnement de la psychologie de masse et l’emprise du marketing – et le métier qu’on exerce.
C’est dans la société de masse administrée à grande échelle que l’identité repose le plus sur l’emploi, et que, par conséquent, la détresse psychologique que provoque sa perte est la plus grande. […] Si les craintes se cristallisent sur l’emploi, c’est que, faute de tout le reste, notre existence ne repose plus que là-dessus. Le salariat est devenu notre seul habitat. Au fond, nous le savons bien : pas plus que la précarité ne se résume à un contrat de travail à durée déterminée, l’habitat n’est réductible à la possession d’un trois pièces en banlieue, proche gare et tous commerces. Habiter le monde, cela signifie pouvoir y trouver sa place, s’y situer. C’est avoir des occupations qui ont du sens, des fréquentations et un lieu de vie qui ne sont pas tributaires d’un mouvement du CAC 40 qui obligera à déménager, à quitter ses collègues, son monde. C’est apprendre avec joie que Carrefour a fait faillite, parce-qu’on sait cultiver un jardin et récupérer de l’eau de pluie, et que d’autres élèvent des bêtes ; savoir que la vie continuerait même si internet tombait en panne. Par contraste, la grande précarité est une dynamique propre au capitalisme industriel consistant à priver les individus de leurs moyens d’habiter le monde. Il est de plus en plus difficile d’y être, d’en être.

Groupe Oblomoff, “Le salaire de la peur”, juillet 2009

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Dès les premières semaines, elle fit allusion à un petit accroc dans le programme d’élevage de cochons inauguré par les marines en 1915, mais tu mis plusieurs mois à comprendre ce qui s’était réellement passé. Un des premiers projets de ces êtres humains roses et rondelets en Haïti avait été de donner des cochons roses et rondelets aux paysans noirs et maigrichons qui, jusque-là, s’étaient parfaitement contentés de leurs cochons noirs et maigrichons, descendants des sangliers qui avaient sillonné l’île à l’époque de sa gloire boucanière. Les cochons noirs raffolaient des ordures, ils vivaient dans les basses-cours et y maintenaient une propreté impeccable en mangeant les épluchures de mangues et de bananes plantains et d’avocats qui traînaient par terre, s’engraissant et somnolant sous le soleil et jouant avec les enfants jusqu’à ce qu’on les abatte enfin en janvier pour la fête de l’Indépendance. Les cochons roses, en revanche, étaient des snobs : ils faisaient les dégoûtés devant les ordures haïtiennes, refusant d’y mettre le groin, et on ne pouvait guère demander aux paysans d’utiliser leur faible récolte de maïs et de haricots pour nourrir les cochons alors qu’elle suffisait à peine et même à grand peine pour nourrir leurs propres enfants avec parfois quelques poignées excédentaires à vendre au marché, alors les cochons roses étaient morts de faim et les basses-cours s’étaient remplies de déchets qui avaient attiré des mouches qui avaient répandu des microbes qui s’étaient emparés des corps vulnérables des enfants, de sorte que ceux-ci étaient maintenant de plus en plus nombreux à s’allonger par terre et à rouler des yeux vitreux et à rendre l’âme.

Nancy Huston, Cantique des plaines

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aztarna

Mugimendu ekologista ainitz, Greenpeace buru, planeta salbatzeko tokiko mailan aritzerat bultzatzen gaituzte. Orain dela guti irakurritako artikulu hori Ipar poloko izotz geruzaren urtzeaz ari da, eta “mugi zaitezte” dio. Horrelako ainitz badire. Orain dela guti Deun lagunak zion bezala, hitz gutitan gauza ainitz biltzen dituzten bere esaldien batean : “Ez da oso begirunezkoa norbait planetari begirunea izaterat behartzea, begirune hau menperatzen ez ditugun bainan isilarazi nahi gaituzten emaitza zientifikotan oinarritzen delarik”.
Urrun gertatzen denaz ohartzea ez da txarra. Bainan mail globalean pentsatzea, tokian aritzeko, funts gutikoa da. Asmo on batetik etortzen da zihur aski, bainan egiten dudana ez dut planetaren egoerari lotu nahi, tona bilioikan zenbatzen diren gauzak ezin baititut hauteman, ezta ere horien gain izaten ahal dudan ekimena. Planetaren mailan izanen dudan eragina gogoan izanez aritzeak ezintasunerat edo abstrakzio hutserat bideratuko nau, eta gehienetan bietarat.
Abstrakzio huts adibidea, ea ekohiritar zintzo bat naizen jakinarazten dautana, nere aztarna ekologikoa da. Ea nere eguneroko ekimenak, nere etxebizitza eta nere elikadura planetaren baliabideen ez-agortzearekin bat dauden ala ez jakinaratzen daut, eta aztarna ttiki bat izateko oso harro egiten nau, edo aldiz haundiegi bat izateko lotsati, eta Jasangarritasunaren Sainduari bere barkamena eskatarazi.
Bizi baldintzak ateratzen ditugun baliabideekiko loturak zenbaki soil batean laburbiltzen ditu aztarna horrek. Mail globalean oinarritutako gogoetak tokiko mailan aplikatzen ditu, eta adibidez haragi eta esneki ainitz jaten dituen norbait, bere etxe inguruan dituen larreetan bizi diren abereetatik hartuak (larre horiek bertze erabilerarik ez luketelarik), eta eguerdiro hamburgestegi batean jaten duen bertze norbait, hainbertze elikagai animal jateagatik antzeko “elikadura aztarna” bat izaten ahalko dute, elikatzen dituzten baliabideekiko harremanak zerikusirik gabe izanez. “Bai noski bainan aztarna kalkulatzeko bakoitzaren berezitasun guziak ezin dire kontutan hartu” erran daiteke. Hain zuzen, hori ez zait gustatzen kalkulu hortan. Aztarna horrek planetaren mailan baizik ez du zentzurik (interesatzen zaienentzat), bainan ez norberaren mailan, uniformizatzaile bihurtuz, bizitzaren aniztasunari, eta inguratzen gaituzten ekosistemekin harreman finak izateko ahalmenari kasurik ez eginez. Aztarna hori den bezala mail batetik bertzerat pasatuz, harekin lotua garen ingurunea urrun atxikitzen dugu, horrekiko harremanak ezagutzeko erabiltzen dugun kalkulu baten bidez, eta itsu bezala aritzen gare, abstrakzioz hauteman baizik ezin dugun planetazko krisi baten aintzinean.
Hautemateen bidez zentzua dugula uste dut (Augustin Berque ari den bezala), eta Anton Txekhoven esaldi batetaz oroitzen naiz : ironiaz begiratzen nauzue, erraten dautzuetan guzia atzeratu eta zintzotasun gutikoa iduritzen zaizue, bainan moztetik salbatu dudan oihan batetik hurbil ibilki naizenean, edo nere eskuz landatutako baso gazte bat xuxurlatzen entzuten dutanean, klima bera pixkat jabetzen dutala sumatzen dut.

Empreinte

Beaucoup de mouvements écolos, Greenpeace en tête, nous enjoignent à agir local pour sauver la planète.
Un article que j’ai lu récemment parle de la fonte de la calotte du pôle Nord et dit “bougez-vous le cul”. Des comme ça il y en a plein. Comme le disait récemment Deun dans une de ses phrases qui résument beaucoup de choses en peu de mots : “Ce n’est pas forcément respectueux d’autrui que de l’obliger à respecter une planète, ce respect étant lui-même largement défini à partir de compte-rendus scientifiques qui nous échappent, mais qui sont censés nous clouer le bec.”
Être renseigné sur des choses qui se passent loin n’est pas un mal. Mais penser global pour agir local, ça gonfle. Je ne doute pas que cela parte d’une bonne intention, mais je refuse de relier l’état de la planète avec ce que je fais, car les choses qui se chiffrent en milliards de tonnes sont des choses que je ne peux pas percevoir, et sur lesquelles mon action ne m’est pas perceptible. Agir en pensant à mon impact sur ces problèmes à l’échelle planétaire me conduira soit à l’impuissance, soit à rester dans l’abstraction pure, et bien souvent les deux.
Exemple d’abstraction pure, me permettant de savoir si je suis un honnête écocitoyen, c’est mon empreinte écologique individuelle. Elle me permet de savoir si mes activités quotidiennes, mon habitation et ma nourriture sont compatibles avec le non-épuisement des ressources de la planète, puis d’être super fier d’avoir une petite empreinte, ou au contraire de culpabiliser d’en avoir une trop grande puis de faire une action carbone pour expier mes péchés.
Cette empreinte réduit à un simple nombre nos liens avec les ressources dont on tire notre subsistance. Elle applique à l’échelle locale des considérations tirées d’un constat global, et par exemple quelqu’un qui mange beaucoup de viande et de produits laitiers issus des bêtes qu’il a sur des pâturages extensifs situés autour de chez lui (pâturages qui auraient difficilement un autre usage), et quelqu’un qui mange tous les midis dans un fast food, auront peut-être de par leur consommation de produits animaux une “empreinte alimentaire” proche, avec des rapports complètement différents aux ressources qui les nourrissent. “Oui mais bon on ne peut pas prendre en compte toutes les particularités de chacun pour calculer son empreinte”, pourrait-on dire. C’est justement ça que je n’aime pas dans ce calcul. Cette empreinte n’a de sens qu’à l’échelle planétaire (pour ceux que ça intéresse), mais aucun sens à l’échelle individuelle où elle devient uniformisante, ne faisant pas cas de la diversité de la vie et de la variété des possibilités de vivre intelligemment avec les écosystèmes qui nous environnent. En transposant cette empreinte telle quelle d’une échelle à l’autre, on maintient à distance l’environnement avec lequel on est lié, à travers un calcul auquel on se réfère pour juger de nos interactions avec cet environnement, et on agit en aveugle face à une crise planétaire qu’on ne peut percevoir autrement que par des vues de l’esprit.
Je crois plutôt que c’est par les sens que nous avons du sens (comme le dit Augustin Berque), et je me rappelle d’une phrase d’Anton Tchekhov :
Vous me regardez avec ironie, tout ce que je vous dis vous semble périmé et peu sérieux, mais quand je passe à proximité d’une forêt que j’ai sauvée du déboisement, ou encore quand j’entends bruire un jeune bois que j’ai planté de mes propres mains, je sens que le climat lui-même est un peu en mon pouvoir.

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Blog huntan aipatuko ditudan gauza hainitz Lisabö taldearen abesti huntan bilduak dire, orduan bertze fitsik erran aintzin, goiz euritsu huntan, textu hau ezartzen dautzuet.

Goiz euria
Nahiz eta goizero ikusten duguna zaldi zuri bat ez den errepidean txikitutako trikua, begia galdu duen katua, jipoitua izan den zakurra baizik, logelak, gordelekuak, lastozko jauregiak, soto ilunak hustu eta lerro-lerro bagoaz, anaitasunari oraindik beldurra dion desfilean, bulego, biltegi, pabilioi, idazkaritza, ikasgela, denda gainontzeko eremu hesituetara gure hatsaz, eta izerdiz, eta keinuz, eta begiradez, eta zitaltasunez, eta goxotasunez ere tarteka, eta ezjakintasunez uneoro zein ezinegonez, eta inertzi amankomun nekagarri nardagarriaz gure mugimenduak elbarritzera, prostituzioari maitasunari baino zilegitasun gehiago emanaz konbentzioei ausardiari baino legeei zuzenbideari baino, komunikazioa gezurra da komunikazioaren garaian, ibiltzea ez da urratsak ematea, sedate me sedate me sedate me one more time, morfina injektatzen duzu egunero nigan, bainan ezin nigan txertatu harriduraren hazia, sustituzioaren garai nakar honetan.

Beaucoup de choses dont je parlerai dans ce blog sont rassemblées dans cette chanson du groupe Lisabö, alors avant de dire quoi que ce soit d’autre, en cette matinée pluvieuse, je vous mets ce texte.

Pluie du matin
Bien que ce que nous voyons tous les matins ne soit pas un cheval blanc mais le hérisson écrasé sur la route, le chat qui a perdu un oeil, le chien qui a été frappé, nous vidons les chambres, les cachettes, les châteaux de paille, les caves obscures, et nous allons alignés, dans ce défilé qui a encore peur de la fraternité, vers les bureaux, entrepôts, pavillons, secrétariats, classes, magasins et autres espaces clôturés, pour, par notre haleine, et par notre sueur, et par nos gestes, et par nos regards, et par notre bassesse, et par notre tendresse aussi parfois, et par autant d’ignorance que d’inquiétude constamment, d’abominable et fatigante inertie commune, mutiler nos mouvements, en rendant plus licite la prostitution que l’amour, les conventions que le courage, les lois que le droit, la communication est un mensonge dans l’ère de la communication, marcher ce n’est pas faire des pas, sedate me sedate me sedate me one more time, tu injectes de la morphine en moi tous les jours, mais tu ne peux pas implanter en moi la graine de l’étonnement, dans cette époque apathique des substitutions.

Lisabö, Egun bat nonahi (EP), Acuarela discos, 2002

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