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Archive for the ‘gogo argitzea’ Category

Je suis tombé sur quelques entretiens intéressants avec Augustin Berque (dont je parlais ici et que j’ai découvert il y a quelques années sur le site de Mona Chollet), qui poussent les réflexions un peu plus loin concernant l’empreinte écologique et notre rapport au monde, éclairent pas mal d’angles morts et ouvrent pas mal de fenêtres.
(cliquer sur les liens pour accéder aux vidéos)

Il ne faut pas réduire le problème à sa dimension écologique par lecafeavec
Les écolos ne se posent pas le problème de l’écoumène, cela reste dans un angle mort du mouvement écolo actuel. Or notre relation à la Terre n’est pas uniquement écologique, elle est également écouménale, elle implique aussi des systèmes techniques et des systèmes symboliques. C’est cette dimension technique et symbolique qui fait notre rapport au monde en tant qu’humains. Notre monde humain repose sur les écosystèmes mais il les dépasse également, il nous faut comprendre en quoi.

La technique est bel et bien une extériorisation, qui prolonge notre corporéité hors de notre corps jusqu’au bout du monde ; mais le symbole est au contraire une intériorisation, qui rapatrie le monde au sein de notre corps. Quand le robot Sojourner saisit cette pierre, là-bas sur Mars, il prolonge, grâce à la technique, le geste ancestral de l’Homo habilis, qui, voici deux millions d’années, investit dans un galet aménagé, tenu à bout de bras, une fonction jusque-là uniquement exercée par les incisives au-dedans de la bouche. Mais inversement, c’est avec ma bouche, ici et maintenant, que je parle de Mars et de Sojourner, qui sont loin dans l’espace, et d’Homo habilis, qui est loin dans le temps. Je peux le faire grâce à la fonction symbolique, laquelle, sous ce rapport, consiste donc à rendre présentes au-dedans de mon corps des choses qui en sont physiquement éloignées. Cela, ce n’est pas une projection ; c’est, tout au contraire, une introjection. La trajection, c’est ce double processus de projection technique et d’introjection symbolique. C’est le va-et-vient, la pulsation existentielle qui, animant la médiance, fait que le monde nous importe. Il nous importe charnellement, parce qu’il est issu de notre chair sous forme de techniques et qu’il y revient sous forme de symboles. C’est en cela que nous sommes humains, en cela qu’existe l’écoumène, et c’est pour cela que le monde fait sens.
(extrait de “Ecoumène, introduction à l’étude des milieux humains”, Augustin Berque)

“Ce monde là court à la catastrophe…” par lecafeavec
On n’a pas qu’un corps animal, on a aussi un corps médial, fait de projections et d’introjections. Ce corps n’existe qu’en lien avec le monde. L’humain et le monde que construit l’émergence de l’espèce humaine sont co-dépendants. C’est le rapport entre ces systèmes (techniques et symboliques) extérieurs à notre corps et leur effet en retour sur le corps animal qui explique l’émergence de l’espèce humaine. On humanise l’environnement par nos systèmes symboliques, on l’anthropise par nos systèmes techniques. C’est l’effet retour des symboles et des techniques sur notre corps qui nous fait humains.
Cette notion de co-dépendance (ou co-suscitation) a été beaucoup plus creusée dans les traditions asiatiques que dans les traditions européennes. On pourrait avoir tendance à les rejeter car ces réflexions (dans les civilisations asiatiques) font aussi appel à des éléments religieux et mystiques, mais on aurait tort de se priver de ces sources-là car elles peuvent être des inspirations utiles pour pouvoir changer de rails.

La pulsion de retour à la “nature” détruit la “nature” par lecafeavec
Une des pires façons actuelles d’habiter le monde est ce qu’il appelle “l’urbain diffus”, ou que d’autres appelle “suburbia”, soit vivre loin des centres urbains tout en continuant à avoir avoir un mode de vie urbain, sur le modèle pavillon + voiture qui est l’idéal de beaucoup de gens. En arrière plan de cet idéal se trouve l’aspiration à vivre près de la “nature” (même si cette “nature” se traduit factuellement par du gazon et des thuyas). C’est en partie un mode de vie de riches qui s’est plus moins démocratisé avec la société de consommation, qui chez certaines élites anciennes incluait l’observation de la nature, mais excluait (ou forcluait, pour reprendre son terme) le travail paysan, le travail qui consiste à obtenir une production alimentaire par aménagement de la nature.
Outre cette “démocratisation”, cette aspiration à vivre près de la “nature” provient d’une pulsion très ancienne qui est celle du retour à la matrice originelle (ou nostalgie du sein maternel). Cette pulsion, dans la façon dont elle s’exprime aujourd’hui, a des résultats destructeurs tant au niveau écosystémique qu’humain.

“Nous assistons à la transformation de l’humain en cyborg” par lecafeavec
Le mode de vie campagnard et son rapport particulier à la terre subsistent aujourd’hui à l’état relictuel dans l’occident. Le développement de la société de consommation à partir des années 1950 a engendré l’extinction de la culture paysanne, laissant place à des entrepreneurs agricoles fonctionnant sur un mode civilisationnel urbain.
L’urbain diffus défait la ville et défait la campagne, par un système mécanique qui se développe selon sa propre logique. Tout se construit en fonction de l’usage de la voiture, qui tue pourtant 1.5 millions de gens par an dans le monde. On adapte nos espaces à l’automobile plutôt que l’inverse.
Au-delà de cette omniprésence et ces dégâts humains causés par la voiture, les systèmes mécaniques transforment l’humain en cyborg (être ne pouvant pas vivre sans machine), dans la mesure où on pense le monde en terme de machine (pensée mécaniciste moderne issue entre autres de Descartes).

“Il n’est pas certain que je veuille laisser une épitaphe par lecafeavec
Il faudra sûrement une catastrophe pour servir de déclic au dépassement de l’idéal pavillon + voiture, au changement de notre rapport au monde.

Il y aurait encore beaucoup de choses à développer à partir de ces entretiens, ça sera peut-être l’objet d’autres billets à suivre.

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Nous ne sommes pas faits pour demeurer dans l’enfance mais celui qui, en la quittant, en a dégradé, ou ignoré, ou méprisé l’inspiration, est devenu un grand enfant mutilé, un adulte infantile. Son adieu à l’enfance était comme un premier adieu à la vie. Il n’a pas osé, ou pas pu, accueillir ce qui, en elle, le conduisait à son absolue singularité tout en lui offrant la seule possibilité sérieuse de reconnaître ses semblables, aussi singuliers que lui. Cet adulte-là a refusé le meilleur de l’enfance ; par contre, il en a gardé les tics, les stigmates : l’habitude, plus ou moins hypocrite, de la soumission, le goût lugubre de comparer son sort, toujours à son désavantage, avec celui des autres, avec celui des grands, la manie de ressasser son impuissance. Et surtout, comme au temps où on lui expliquait qu’il n’était qu’un gosse, la propension à gommer ses rêves, le refus d’imaginer que de si grandes choses puissent tenir dans un esprit si limité, dans un cœur si étroit : détestable sagesse qui nourrit l’ironie méchante, la rancœur, une stupide suffisance qui masque mal un cruel dégoût de soi. L’adulte infantile a triché avec le jeu de son enfance. Il n’a pas pris le temps – ou on ne lui a pas permis – de s’en laisser pénétrer jusqu’à la joie, jusqu’aux larmes, jusqu’à l’angoisse. Il s’est – ou on lui a – interdit l’accès à ses sources et il n’a osé rentrouvrir cet accès que chichement, prêt à le refermer au moindre froncement de sourcils des autres, ces autres qui ne sont plus alors ses semblables ni ses possibles amis, mais ses concurrents, ses ennemis, ses geôliers, ses bourreaux, ses complices. Ce jeu qui le requérait tout entier, qui n’avait rien de commun avec les passe-temps qu’on lui proposait, dont ses obligations d’adulte seraient la fastidieuse répétition, ce jeu qui voulait le rendre à lui-même en l’arrachant à lui-même, il en a parfois senti le souffle sur son âme, mais il n’a pas osé la lui abandonner. C’était de sa vie que l’intrépide enfance voulait faire un jeu, un jeu qui n’eût rien refusé de son cœur ni de son esprit, un jeu où, peu à peu, comme dans un tourbillon, seraient entrées sa conscience et sa raison. Un jeu où elles se seraient reconnues, où elles auraient trouvé leur place et découvert leur puissance, et son sens.

Jean Sur, Résurgences – marché 52

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Ixiltasuna

“Batzutan jendeek mintzatu ezin balute bezala egiten dugu. Bainan berez ez dire mintzazten gelditzen […] Hortik arazoa ez dela jendeei mintzaraztea, baizik eta bakartasun eta ixiltasun hutsuneak uztea, horietatik azkenean erratekorik izan dezaten. Indar zapaltzaileek ez diete jendeei adieraztea oztopatzen, aitzitik adieraztera behartzen dituzte. Fitsik ez errateko izatearen goxotasuna, fitsik ez errateko izatearen eskubidea, errana izatea mereziko lukeen gauza urri edo balios bat sortzeko baldintza baita. Gaur hiltzen gaituena, ez da nahaskeria, funtsik gabeko proposamenak baizik.”

Silence

“On fait parfois comme si les gens ne pouvaient pas s’exprimer. Mais, en fait, ils n’arrêtent pas de s’exprimer. […] Si bien que le problème n’est plus de faire que les gens s’expriment, mais de leur ménager des vacuoles de solitude et de silence à partir desquelles ils auraient enfin quelque chose à dire. Les forces de répression n’empêchent pas les gens de s’exprimer, elles les forcent au contraire à s’exprimer. Douceur de n’avoir rien à dire, droit ne n’avoir rien à dire, puisque c’est la condition pour que se forme quelque chose de rare ou de raréfié qui mériterait un peu d’être dit. Ce dont on crève actuellement, ce n’est pas du brouillage, c’est des propositions qui n’ont aucun intérêt.”

Gilles Deleuze

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hirugarren arauaz

Hemen pixkat aipatzen nuen Toby Hemenway-en artikulu batera itzultzen naiz. Hortan permakulturaren hirugarren arau etikoa (gaineratikoei buruzkoa) lehengo biak (“lurra zaindu” eta “jendeak zaindu”) baino era nahiko korapilatsuago batean errana dela, eta horrek gaineratikoen arazoaz permakulturazaleen aise eskasa adierazten duela oroitarazten ditu.

Bertze artikulu batean, gaineratikoen arazoa urritasun sentipenari lotzen du. Halere urritasun sentipen hori argitzeko denboraren ikusmoldeaz erraten duena, zizklo- edo lerro formazkoa, ez zait oso sinesgarri iduri. Kultura gehienetan bi ikusmoldeak direla iduritzen zait, bata zikliko edo aurreikusgarri dena (egun/gau, ilargialdiak, ondoz ondoko urtaroak) adierazteko, bertzea lerro-formakoa edo berezia (hazi eta zahartzea, ondoz ondoko urteen arteko ezberdintasunak).
Izatezko larritasuna, “jainkotiarrarekiko lotura”, eta Jainkoei edo apezei gaineratikoen ematearen artean egiten dituen loturak nahiko korapilatsu iruditzen zaizkit ere.

Urritasun sentipena, mail haundi batean, gure bizi baldintzen funtsatzeko erabiltzen ditugun aukeren aniztasunaren menpe iduritzen zait. Gure bizi baldintzak gauza gutitan oinarritzen badire, urritasuna somatuko dugu gauza horietarik bat noizbait eskas egonen denean. Alderantziz, gure bizi baldintzak aniztasun nahikotan oinarrituz, noizbait osaki baten eskasa errexki ordainduko du(te) bertze osaki batek edo batzuk.
Bi muturreko adibideak hartzeko, lur eremu batean oloa bakarrik hazten bada, gosetian izateko zori nahiko haundia izanen dugu (uzta txarra izatekotan) edo gaineratiko kopuru haundi bat (uzta ona izatekotan). Bertzalde, eremu berean oihan-laborantza gaztaindi batean eginez, eta horrez gain baratze biointensiba, oilozaintza estensiba eta putzutan arrain haztea, oroaren ekoizpena ez da hainbertze aldatuko kopurutan, osaki ezberdinen aldaketak elkar ordaintzen ahalko baitire ; zorte oso txarra egon beharko zen osaki bakoitzarentzat urte txarra izateko, era berean ez liteke ohizkoa urte oso on bat osaki guzientzat. Horrez gain, aniztasuna bera egonkortasun faktore bat da, gora-behera horiek leunduko dituena.
Orduan urritasun sentipena eta gaineratikoak gordetzeko beharra, baratze sistemei baino gehiago laborantza sistemei lotuak dire, azken horiek haien aniztasun murriztuarengatik ekoizpen “kopuru anomaliak” maizagotan jasotzen dituztela eta.
Laborantzak elitearen eskuetan poterearen biltzerat eramaten du beti. Laborantzaren bihotzean dagoen gaineratiko gordegarri haundien ondorio saihestezina da. Bertzaldetik kultura berri baten sortzeko beharra izaten ahalko ginuke, hontan gaineratikoa, baita hori nahigarri egiten duten beldurra eta gutizia, ez legokete gure ohituren egiturezko emaitza erraten digu Hemenway-ek

Jendarteko hartu-emanetan beldurra eta gutiziaren eragina murrizteari dagokionez, gizarte ezberdinetan Marcel Mauss-ek ematearen inguruan egin zituen behaketa interesgarri batzuk aipatzen ditu. Horietan, emateek sorturiko pertsonen arteko loturak, emandako gauzak baino garrantzitsuagoak dire. Kasu batzutan ere nork nori zenbat eman zion jakitea ezinezkoa izateko trikimailuak daude, preseski kontatze zehatz batengatik emateen jarioa murriztua ez izateko. Deun lagunak aipatzen dituen emate kiribiletan bezala.
Emate-kiribil horiek ohizkoak dire, berehalako erabiltzezko gauzak (janari, tresna, oinarrizko laguntzak) ekoizten diren elkarte ttikitan, nun ere elkar laguntza ta fidantzia aski barneratuak diren harremanak formalizatu beharrik ez izateko.
Bertzela izaten da lurretik kanpoko bizimodu batean, hortan gure zereginak gainespezializatuak baitire eta gutitan berehalako erabiltzezko gauzak ekoizten baitituzte, eta jendarteko loturak nahiko hotz eta gogortuak bihurtu baitire. lerro-lerro bagoaz, anaitasunari oraindik beldurra dion desfilean, bulego, biltegi, pabilioi, idazkaritza, ikasgela, denda gainontzeko eremu hesituetara gure hatsa, eta izerdiz, eta keinuz, eta begiradez, eta zitaltasunez, eta goxotasunez ere tarteka, eta ezjakintasunez uneoro zein ezinegonez, eta inertzi amankomun nekagarri nardagarriaz gure mugimenduak elbarritzera, prostituzioari maitasunari baino zilegitasun gehiago emanaz konbentzioei ausardiari baino legeei zuzenbideari baino
Jendarteko loturen gogortasunak, lurretik kanpoko bizimodu batean, ezjabetasun sentipena sendotzen baitu ere. Von Foersterek zion bezala, gizakien arteko loturak hainbat eta gogorragoak izanez, oroaren joera, osatzen duten gizakiei gero eta menperatu ezin duten dinamika berezi batekoa ageriko zaie.
Permakulturaren garapenak gaineratikoen mugitze informalarekin bat egin behar du, informaltasun hori giza-eskalako hartu-emanetan baizik izaten ezin dela.

Hemen gelditzen naiz (oraingoz) hiru arau horiek pixkat aldatuz :
1. Gure ingurua eta bere aniztasuna zaindu
2. Jendeak zaindu, norberetik hasiz
3. Gaineratikoak mugitzen ahal diren loturak sortu

À propos du troisième principe (gehiago…)

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heldu izan (2)

Le fait – l’Unité du monde – me plantait là, incapable d’en bien parler, à cause de son évidence. Je ne savais que répéter : «il y a un seul monde. Les choses extérieures n’existent que si tu jettes vers elles tout ce que tu portes en toi. Quant aux choses intérieures, tu ne les verras jamais bien, à moins que tu ne laisses entrer toutes celles du dehors.»
Passer de la lumière interne à celle du Soleil, ce n’était pas l’affaire des sens : un déclic suffisait, un très léger changement de point de vue – comme de tourner la tête d’un centième de cercle.

Jacques Lusseyran, Et la lumière fut

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Il ne s’agit pas seulement des habitants d’un pays ni de l’ensemble des personnes qui parlent une même langue mais encore et surtout d’un pluriel réconfortant, de l’une des multiples façon de dire nous. Synonyme, donc, de famille, de société, de groupe ; synonyme aussi, du moins au début, de confrérie, d’alliance, de communauté, de cercle d’amis ; synonyme enfin – à l’heure où les étendards flottants ne font plus vibrer le coeur de l’homme intelligent – de chimère, d’illusion, de mensonge pieux. “Si je dis que je me sens seul, c’est que je n’ai plus la force de dire nous“, écrivait un poète Basque dans sa dernière lettre. S’il avait été Chinois ou Japonais, peut-être eût-il dit : “Avec le singulier et le pluriel, nous sommes trois : moi, nous et un pont qui s’est effondré.”

Bernardo Atxaga

(en écho à une remarque de Nicollas)

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aztarna

Mugimendu ekologista ainitz, Greenpeace buru, planeta salbatzeko tokiko mailan aritzerat bultzatzen gaituzte. Orain dela guti irakurritako artikulu hori Ipar poloko izotz geruzaren urtzeaz ari da, eta “mugi zaitezte” dio. Horrelako ainitz badire. Orain dela guti Deun lagunak zion bezala, hitz gutitan gauza ainitz biltzen dituzten bere esaldien batean : “Ez da oso begirunezkoa norbait planetari begirunea izaterat behartzea, begirune hau menperatzen ez ditugun bainan isilarazi nahi gaituzten emaitza zientifikotan oinarritzen delarik”.
Urrun gertatzen denaz ohartzea ez da txarra. Bainan mail globalean pentsatzea, tokian aritzeko, funts gutikoa da. Asmo on batetik etortzen da zihur aski, bainan egiten dudana ez dut planetaren egoerari lotu nahi, tona bilioikan zenbatzen diren gauzak ezin baititut hauteman, ezta ere horien gain izaten ahal dudan ekimena. Planetaren mailan izanen dudan eragina gogoan izanez aritzeak ezintasunerat edo abstrakzio hutserat bideratuko nau, eta gehienetan bietarat.
Abstrakzio huts adibidea, ea ekohiritar zintzo bat naizen jakinarazten dautana, nere aztarna ekologikoa da. Ea nere eguneroko ekimenak, nere etxebizitza eta nere elikadura planetaren baliabideen ez-agortzearekin bat dauden ala ez jakinaratzen daut, eta aztarna ttiki bat izateko oso harro egiten nau, edo aldiz haundiegi bat izateko lotsati, eta Jasangarritasunaren Sainduari bere barkamena eskatarazi.
Bizi baldintzak ateratzen ditugun baliabideekiko loturak zenbaki soil batean laburbiltzen ditu aztarna horrek. Mail globalean oinarritutako gogoetak tokiko mailan aplikatzen ditu, eta adibidez haragi eta esneki ainitz jaten dituen norbait, bere etxe inguruan dituen larreetan bizi diren abereetatik hartuak (larre horiek bertze erabilerarik ez luketelarik), eta eguerdiro hamburgestegi batean jaten duen bertze norbait, hainbertze elikagai animal jateagatik antzeko “elikadura aztarna” bat izaten ahalko dute, elikatzen dituzten baliabideekiko harremanak zerikusirik gabe izanez. “Bai noski bainan aztarna kalkulatzeko bakoitzaren berezitasun guziak ezin dire kontutan hartu” erran daiteke. Hain zuzen, hori ez zait gustatzen kalkulu hortan. Aztarna horrek planetaren mailan baizik ez du zentzurik (interesatzen zaienentzat), bainan ez norberaren mailan, uniformizatzaile bihurtuz, bizitzaren aniztasunari, eta inguratzen gaituzten ekosistemekin harreman finak izateko ahalmenari kasurik ez eginez. Aztarna hori den bezala mail batetik bertzerat pasatuz, harekin lotua garen ingurunea urrun atxikitzen dugu, horrekiko harremanak ezagutzeko erabiltzen dugun kalkulu baten bidez, eta itsu bezala aritzen gare, abstrakzioz hauteman baizik ezin dugun planetazko krisi baten aintzinean.
Hautemateen bidez zentzua dugula uste dut (Augustin Berque ari den bezala), eta Anton Txekhoven esaldi batetaz oroitzen naiz : ironiaz begiratzen nauzue, erraten dautzuetan guzia atzeratu eta zintzotasun gutikoa iduritzen zaizue, bainan moztetik salbatu dudan oihan batetik hurbil ibilki naizenean, edo nere eskuz landatutako baso gazte bat xuxurlatzen entzuten dutanean, klima bera pixkat jabetzen dutala sumatzen dut.

Empreinte

Beaucoup de mouvements écolos, Greenpeace en tête, nous enjoignent à agir local pour sauver la planète.
Un article que j’ai lu récemment parle de la fonte de la calotte du pôle Nord et dit “bougez-vous le cul”. Des comme ça il y en a plein. Comme le disait récemment Deun dans une de ses phrases qui résument beaucoup de choses en peu de mots : “Ce n’est pas forcément respectueux d’autrui que de l’obliger à respecter une planète, ce respect étant lui-même largement défini à partir de compte-rendus scientifiques qui nous échappent, mais qui sont censés nous clouer le bec.”
Être renseigné sur des choses qui se passent loin n’est pas un mal. Mais penser global pour agir local, ça gonfle. Je ne doute pas que cela parte d’une bonne intention, mais je refuse de relier l’état de la planète avec ce que je fais, car les choses qui se chiffrent en milliards de tonnes sont des choses que je ne peux pas percevoir, et sur lesquelles mon action ne m’est pas perceptible. Agir en pensant à mon impact sur ces problèmes à l’échelle planétaire me conduira soit à l’impuissance, soit à rester dans l’abstraction pure, et bien souvent les deux.
Exemple d’abstraction pure, me permettant de savoir si je suis un honnête écocitoyen, c’est mon empreinte écologique individuelle. Elle me permet de savoir si mes activités quotidiennes, mon habitation et ma nourriture sont compatibles avec le non-épuisement des ressources de la planète, puis d’être super fier d’avoir une petite empreinte, ou au contraire de culpabiliser d’en avoir une trop grande puis de faire une action carbone pour expier mes péchés.
Cette empreinte réduit à un simple nombre nos liens avec les ressources dont on tire notre subsistance. Elle applique à l’échelle locale des considérations tirées d’un constat global, et par exemple quelqu’un qui mange beaucoup de viande et de produits laitiers issus des bêtes qu’il a sur des pâturages extensifs situés autour de chez lui (pâturages qui auraient difficilement un autre usage), et quelqu’un qui mange tous les midis dans un fast food, auront peut-être de par leur consommation de produits animaux une “empreinte alimentaire” proche, avec des rapports complètement différents aux ressources qui les nourrissent. “Oui mais bon on ne peut pas prendre en compte toutes les particularités de chacun pour calculer son empreinte”, pourrait-on dire. C’est justement ça que je n’aime pas dans ce calcul. Cette empreinte n’a de sens qu’à l’échelle planétaire (pour ceux que ça intéresse), mais aucun sens à l’échelle individuelle où elle devient uniformisante, ne faisant pas cas de la diversité de la vie et de la variété des possibilités de vivre intelligemment avec les écosystèmes qui nous environnent. En transposant cette empreinte telle quelle d’une échelle à l’autre, on maintient à distance l’environnement avec lequel on est lié, à travers un calcul auquel on se réfère pour juger de nos interactions avec cet environnement, et on agit en aveugle face à une crise planétaire qu’on ne peut percevoir autrement que par des vues de l’esprit.
Je crois plutôt que c’est par les sens que nous avons du sens (comme le dit Augustin Berque), et je me rappelle d’une phrase d’Anton Tchekhov :
Vous me regardez avec ironie, tout ce que je vous dis vous semble périmé et peu sérieux, mais quand je passe à proximité d’une forêt que j’ai sauvée du déboisement, ou encore quand j’entends bruire un jeune bois que j’ai planté de mes propres mains, je sens que le climat lui-même est un peu en mon pouvoir.

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heldu izan

Hor erraten nuenaren jarraia.
Ongi jateaz bakarrik ez gare bizi, egunero 30 minutu ibiltzeaz eta 2 hektare baino gutiagoko aztarna ekologiko bat izateaz. Janari eta atsedena ez du gorputzak bakarrik behar, horrela balitz bizitzea bizirautea baizik ez litzateke. Bainan bizirauten baizik ez dutenei ere, makinak bezala tratatuak direnei edo haien burua makina gisa tratatzen dutenei, noizbait zerbait askatzen zaie, maiz ulertu gabe, gaizki ibilki dena alde baterat utzia baita.
Ez dago bakarrik gure oinak ibiltzen diren mundua, gure baitan pizten diren bazterrak ere, eta horien itzaltzea berelbarritze era bat da. Iratzarririk amets egiteko gogoa, lurra bustitzen entzuteko gogoa, xukatzen duen haizea azalean sumatzeko gogoa, zuhaitz batean adarretan hatzak ikusteko gogoa, zuhaitzik ikusteko gogoa ez dagoen tokitan, denboragabeko iragan baten irudiak norbere baitan jariatzen utzi, gelditzeko gogoa, gauzak pasatzen sumatzeko. Horren ordez, asmo guzi horiek ez balira bezala egiten dugu, helduak garelakotz eta haurkeritan galtzeko denborarik ez baitugu, lanean eraginkor aritzeko hor gaudela eta bizirauteko makinak bezala ari gare. “Alde egin beharra” gelditzen da, gune zabalen, bazter berrien, sentsazio baketsu eta indarberrigarrien bilaketa, horren mukurua behar eta bilaketa horiek merkatuak direla, hegazkinen bitarteko bidaiez edota itsas-terapiez, berelbarritzera eramaten gaituenaren onerako. Eta noski ez du fitsik konpontzen. Morfina injektatzen duzu egunero nigan, bainan ezin nigan txertatu harriduraren hazia, substituzioaren garai nakar honetan.
Heldu izatea, hasteko, zuhur izatea da, dagoena ikustea da. Munduaren gogortasunari aurre egitea gure barne bazterrak ezeztatuz, eta bazter horiek hesituak, histuak, zatituak edo suntsituak izaten uztea, ez da zuhur izatea. Haunditzea, ez da barne mundu hau baztertzea, ezta ere ukatzea. Bizirauteko egin behar dena egitean haunditzen ahal da, hazi hau hazi eta haunditzeko une oso bat utziz. Biziraun nahi izateko bizi behar da, eta bizitzeko gure barneari jaten eta atseden hartzen utzi. Eta batez ere, barne hori basa atxiki, bere gerezi loreekin bainan ere bere lahar, adar ustel eta lohizko putzuekin. Ez egin balizatutako erreserba bat, harri ttikizko bideekin eta hesiz inguraturik, gure osasun-kapitalaren kudeaketa optimizatuarako antolatua, ez luke suntsitzea baino askoz gehiago balioko.
Ametsa ez da gehiegizkoa, ez da ere beti ekimenaren etsaia. Beharrezkoa da. (De la bonne distance à prendre avec le réel, Mona Chollet)

Être arrivé / Être adulte
Suite de ce que je disais .
On ne vit pas qu’en mangeant bien, en marchant 30 minutes par jour et en ayant une empreinte écologique inférieure à 2 hectares. Il n’y a pas que le corps qui a besoin de se nourrir et de se reposer, si c’était le cas la vie se limiterait à la survie. Mais même chez ceux qui ne font que survivre, qui sont traités ou se traitent eux-mêmes comme des robots, il y a quelque-chose qui finit par lâcher un jour ou l’autre, souvent dans l’incompréhension, car ce qui va mal est trop ignoré.
Il n’y a pas que le monde où marchent nos pieds, il y a aussi les paysages qui s’allument en nous, et les éteindre est une forme d’automutilation. Envie de rêvasser, envie d’écouter la terre qui se mouille, envie de sentir sur soi le vent qui l’essuie, envie de voir des doigts dans les branches d’un arbre, envie de voir des arbres là où il n’y en à pas, laisser venir en soi des images d’un passé intemporel, envie de s’arrêter, pour sentir passer les choses. Au lieu de ça, on fait comme si toutes ces aspirations n’existaient pas, parce-qu’on est adulte et qu’on n’a pas de temps à perdre dans des choses d’enfant, parce-qu’on est là pour s’activer et être efficace, on fait semblant d’être des machines à survivre. Reste un “besoin d’évasion”, une recherche d’espace, de nouveaux paysages, de sensations paisibles et réconfortantes, le comble étant que tout cela est monnayé, à travers des voyages en avion et des cures de thalasso, par cela-même qui nous fait nous automutiler. Et bien sûr cela ne résoud rien.
Tu injectes de la morphine en moi tous les jours, mais tu ne peux pas implanter en moi la graine de l’étonnement, dans cette époque apathique des substitutions.
Être adulte, c’est d’abord être lucide, c’est d’abord voir ce qui est. Affronter la dureté du monde en ignorant nos paysages intérieurs, et laisser ces paysages se faire clôturer, ternir, découper ou dévaster, ce n’est pas être lucide. Grandir, ce n’est pas renoncer à ce monde intérieur, encore moins le nier. On peut grandir en faisant ce qu’il faut pour survivre, et en gardant un espace intact pour que cette graine germe et grandisse. Pour vouloir survivre il faut vivre, et pour vivre il faut laisser notre intérieur se nourrir et se reposer. Et surtout, garder cet intérieur sauvage, avec ses fleurs de cerisier mais aussi ses ronces, ses branches mortes, ses flaques de boue. Ne pas en faire une réserve balisée, avec des chemins de gravillons et des barrières autour, planifiée pour une gestion optimisée de notre capital-santé, cela ne vaudrait pas beaucoup mieux que la dévastation.
Le rêve n’est pas un luxe, pas plus qu’il n’est forcément ennemi de l’action. Il est nécessaire. (De la bonne distance à prendre avec le réel, Mona Chollet)

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Blog huntan aipatuko ditudan gauza hainitz Lisabö taldearen abesti huntan bilduak dire, orduan bertze fitsik erran aintzin, goiz euritsu huntan, textu hau ezartzen dautzuet.

Goiz euria
Nahiz eta goizero ikusten duguna zaldi zuri bat ez den errepidean txikitutako trikua, begia galdu duen katua, jipoitua izan den zakurra baizik, logelak, gordelekuak, lastozko jauregiak, soto ilunak hustu eta lerro-lerro bagoaz, anaitasunari oraindik beldurra dion desfilean, bulego, biltegi, pabilioi, idazkaritza, ikasgela, denda gainontzeko eremu hesituetara gure hatsaz, eta izerdiz, eta keinuz, eta begiradez, eta zitaltasunez, eta goxotasunez ere tarteka, eta ezjakintasunez uneoro zein ezinegonez, eta inertzi amankomun nekagarri nardagarriaz gure mugimenduak elbarritzera, prostituzioari maitasunari baino zilegitasun gehiago emanaz konbentzioei ausardiari baino legeei zuzenbideari baino, komunikazioa gezurra da komunikazioaren garaian, ibiltzea ez da urratsak ematea, sedate me sedate me sedate me one more time, morfina injektatzen duzu egunero nigan, bainan ezin nigan txertatu harriduraren hazia, sustituzioaren garai nakar honetan.

Beaucoup de choses dont je parlerai dans ce blog sont rassemblées dans cette chanson du groupe Lisabö, alors avant de dire quoi que ce soit d’autre, en cette matinée pluvieuse, je vous mets ce texte.

Pluie du matin
Bien que ce que nous voyons tous les matins ne soit pas un cheval blanc mais le hérisson écrasé sur la route, le chat qui a perdu un oeil, le chien qui a été frappé, nous vidons les chambres, les cachettes, les châteaux de paille, les caves obscures, et nous allons alignés, dans ce défilé qui a encore peur de la fraternité, vers les bureaux, entrepôts, pavillons, secrétariats, classes, magasins et autres espaces clôturés, pour, par notre haleine, et par notre sueur, et par nos gestes, et par nos regards, et par notre bassesse, et par notre tendresse aussi parfois, et par autant d’ignorance que d’inquiétude constamment, d’abominable et fatigante inertie commune, mutiler nos mouvements, en rendant plus licite la prostitution que l’amour, les conventions que le courage, les lois que le droit, la communication est un mensonge dans l’ère de la communication, marcher ce n’est pas faire des pas, sedate me sedate me sedate me one more time, tu injectes de la morphine en moi tous les jours, mais tu ne peux pas implanter en moi la graine de l’étonnement, dans cette époque apathique des substitutions.

Lisabö, Egun bat nonahi (EP), Acuarela discos, 2002

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